mardi 3 août 2010

Karei naru Ichizoku

Nul besoin d’être un étymologiste confirmé pour comprendre l’origine du terme « drama » employé par les Japonais pour désigner leurs séries télévisées. Pour autant, Karei naru Ichizoku mérite sans doute, plus que toute autre série de ma connaissance, d’être apparentée aux genres classiques des drames bourgeois et romantique. S’il n’en reprend pas tous les codes, il s’en inspire clairement pour proposer l’histoire de l’affrontement entre un père et son fils, au sein d’une grande dynastie bourgeoise des années 1960.

En me lançant dans ce drama, il me fallait passer par delà un scenario, au travers duquel je craignais de retrouver l’une de ces séries familiales francophones que je fuis à toute jambe chaque été. Passionné d’Histoire, la perspective de plonger dans l’époque du Japon d’après-guerre m’avait convaincu de tenter ma chance. Je n’ai pu que m’en féliciter, car Karei naru Ichizoku fait en effet découvrir en détails aux téléspectateurs le développement économique à marche forcée du Japon conduit par ses élites gouvernementales. En l’occurrence, Manpyo Daisuke (Kitaoji Kinya) est à la tête d’une banque d’importance moyenne, menacée par un mouvement de concentration visant à créer, de force si nécessaire, un panel restreint de grandes institutions bancaires. Dans le même temps, son fils aîné, Manpyo Teppei (Kimura Takuya), ambitionne de révolutionner l’industrie sidérurgique japonaise en modernisant les hauts fourneaux d’antan. Cette période d’intense agitation économique, où les manipulations politiques orientent les décisions financières, où les intérêts des modernes se heurtent au conservatisme des anciens, est parfaitement bien rendue. On se trouve ainsi plongé au cœur même d’un machiavélisme politico-économique qui ne s’embarrasse plus d’idéaux chevaleresque tombés en désuétude. C’est d’ailleurs là l’un des premiers points d’opposition entre un père, prêt à toutes les compromissions et les trahisons pour garder la main mise sur son empire, et un fils, moderniste par son savoir, mais dont les valeurs morales sont obsolètes dans cette nouvelle ère. Elles font certes de lui un meneur d’hommes, mais surtout un être qui s’accommode mal du cynisme de ceux qui l’entourent.

L’affrontement entre les deux hommes constitue le cœur même du drame. C’est à un véritable affrontement de valeurs que le téléspectateur assiste. Derrière la façade de respectabilité d’une grande dynastie bourgeoise, le patriarche impose en effet à sa famille un mode de vie détestable, où son assistante et maîtresse s’impose en privé à son épouse légitime et à ses enfants. Les humiliations qu’elle fait subir aux uns et aux autres, avec l’assentiment du chef de famille, sont bien évidemment insupportables pour un Manpyo Teppei révolté… et incrédule. Car la lutte voilée entre les deux hommes est totalement déséquilibrée, le jeune Teppei ne comprenant pas pourquoi ses efforts désespérés pour plaire à son père ne rencontre que le rejet d’un Manpyo Daisuke reptilien qui semble jouir des échecs de son fils, quand il n’en est pas directement à l’origine.

Au fil des épisodes, les raisons du drame se feront jour peu à peu, en même temps que la famille et ceux qui l’entourent s’enfonceront de plus en plus dans la noirceur et le chaos des évènements. Les autres personnages mériteraient d’ailleurs plusieurs lignes de commentaires eu égard à leur performance. Un casting riche et impeccable permet en effet d’éviter toute fausse note. Pour autant, cette chronique ne s’en fera pas plus l’écho, non par paresse, mais bien parce qu’au terme de ce drame, le face à face du père et du fils occultera tout autre souvenir de cette grande série.

1 commentaire:

nshi a dit…

Article qui donne très envie de découvrir ce drama ! Faut absolument que je m'y mette !