vendredi 14 novembre 2008

Beautiful Life


Ce drama est un monument de la télévision japonaise. Pour donner une idée, cette série a raflé tous les prix aux 24th Television Drama Academy Awards, son onzième et dernier épisode a décroché la plus forte audience (41.3% !) jamais enregistrée pour un drama depuis 1983... En vérité, les statistiques démontrant l’implacable succès de Beautiful Life sont légion. La présence de Kimura Takuya, en dépit de son immense popularité, ne saurait à elle seule expliquer un tel phénomène. Quelles peuvent bien être les raisons d’un tel succès ?

Beautiful Life est tout à la fois une simple romance et bien plus. Au thème, désormais mille fois traité, de l’amour par delà les différences, s’ajoute celui, plus original, du handicap. Et il faut bien s’incliner devant la façon magistrale dont le sujet a été abordé. Je suis resté pantois devant la compréhension intime de la scénariste (Kitagawa Eriko) s’agissant du rapport de la personne handicapée à sa maladie et surtout aux autres.

Kyoko (Tokiwa Takako) est cette femme en fauteuil roulant, vivante, courageuse, et pourtant si pleine d’appréhensions : comment croire en l’amour quand on se sent soi-même si faible, si différente, si anormale ? Car le quotidien renvoie sans cesse à Kyoko cette image d’anormalité : impossibilité de rentrer dans certaines boutiques à cause des marches, dans les restaurants à cause du manque d’espace pour faire passer un fauteuil roulant, taxi refusant de s’arrêter la prendre en charge, craintes de la fiancée de son frère de devoir supporter la charge future d’une handicapée, etc. L’inadaptation de nos sociétés censément modernes aux personnes à mobilité réduite est montrée de façon criante quoique sans ostentation. Kyoko veut vivre comme tout un chacun - travailler, voyager… - mais son courage ne masque pas ses doutes. Quand Shuji (Kimura Takuya) passe du temps avec elle, est-ce par pitié ? Quand il la prend pour modèle, est-ce pour marquer les esprits en se faisant photographier avec une handicapée ? Quelle chance a-t-elle de plaire à un homme brillant, aimé, admiré ? Quel futur pour elle, pour eux ? Kyoko se voit naturellement toujours elle-même d’abord au travers de son handicap. Et c’est là qu’est tout le « combat » mené par Shuji : bien avant d’être une personne handicapée, il montre à Kyoko qu’elle est une femme, une femme ayant droit aux mêmes sentiments, aux mêmes bonheurs, aux mêmes envies que tout un chacun. Bourru, réservé à la limite de l’inexpressivité, Shuji se comporte avec elle comme avec n’importe-quelle autre femme valide. Il ne nie pas son handicap, mais le remet à sa place, autrement dit loin, très loin, derrière tout ce qui fait de Kyoko une femme qui l’attire et qu’il va aimer profondément. Et celle-ci a tellement envie d’y croire, tellement peur d’y croire…

Je ne crois pas que cette question du handicap suffisait en elle-même à apporter un tel succès à ce drama, mais, tout à la fois centrale et diffuse, elle a donné une intensité et une véracité uniques aux sentiments qui unissent Kyoko et Shuji. Là se crée la différence entre Beautiful Life et ses séries-sœurs. Entre la finesse de l’évocation du thème du handicap, la romance des personnages principaux, la légèreté de certaines scènes, la gravité et l’impact émotionnel de certaines autres, un parfait équilibre est atteint. Egalement porté par d’excellents acteurs, Beautiful Life s’avère ainsi être un drame sentimental à nul autre pareil.


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9/10 : If you don’t watch this, you’ll regret it for the rest of your life.